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1h59′ sur marathon : est-ce vraiment possible ? Lui pense que oui.

12 octobre 2019 | News

Par la rédaction, et Gaël Couturier. Une étude de Christoph Triska, Wouter Hoogkamer, Kristine Snyder, Paolo Taboga, Christopher J. Arellano et Rodger Kram. Photos © Jon Super, Dan Vernon pour INEOS 1:59 Challenge,  CU Boulder.

Vous commencez à le savoir, c’est ce matin, à 8h15 heure locale en Autriche ou en France (Central European Summer Time) que le Kenyan Eliud Kipchoge, accompagné de ses lièvres, va s’élancer à Vienne, pour tenter d’être le premier homme à passer sous la distance du marathon en moins de deux heures. Ça se passe en live ici : https://www.youtube.com/watch?v=iu2c1P_oCgE. Pour y parvenir, Kipchoge devra courir en 26 secondes de moins que son meilleur chrono qui a été réalisé en 2017 en Italie pour le Breaking 2 Project (il avait alors réalisé 2h et 25 secondes). La question demeure intacte : va-t-il y arriver ? Oui, si l’on en croit cette nouvelle étude américaine de l’université de Boulder dans le Colorado, cette même université qui avait aidé Nike dans la fabrication de ses désormais fameuses Vaporfly, et validé les 4% d’aide indéniable à la performance en course à pied.

Bon, OK, certains de ces scientifiques ont parfois été payés par Nike pour faire du consulting tandis que d’autres l’ont directement été par l’INEOS 1:59 Challenge. D’accord. Mais ça ne change pas les faits : leurs analyses méticuleuses du parcours montrent que notre champion Eliud Kipchoge (oui, Eliud est le champion de l’humanité, rien de moins) a de fortes chances de réaliser au moins 1h59’59 » ce matin, ou moins. Notez que nous avions déjà interrogé ces chercheurs (et que nous avons profité d’un déplacement dans le Colorado, à Denver et à Boulder cette semaine, de l’un d’entre nous pour nous intéresser à leur nouvelle étude.

Notre premier article réalisé en collab’ avec l’université de Boulder était celui-ci :

 https://leblog.enduranceshop.com/nike-zoom-vaporfly-pourquoi-ces-4/

1h59' sur marathon : est-ce vraiment possible ?
1h59' sur marathon : est-ce vraiment possible ?

Pour cette nouvelle étude sur ce projet du marathon en moins de 2h qui nous passionne tous, les chercheurs ont étudié avec précision le parcours.

Pour eux, cela ne fait pas de doute : celui-ci est excellent ! Pas parfait. Non. Mais excellent. L’auteur de l’étude, Rodger Kram (en photo sur la page d’ouverture du blog), un professeur de physiologie intégrée nous a expliqué :

Roger Kram : « Nous voulions quantifier avec précision, de manière scientifique à quel point le parcours est bon : se rapproche-t-il de la perfection ou pas ? Et la réponse est qu’il n’est pas parfait mais s’en rapproche drôlement. Comparé à un parcours parfait, cela n’existe sans doute pas dans la réalité, celui-ci ne devrait ralentir Eliud que de 5 secondes ».

Le Blog Endurance Shop : Et donc ?
Roger Kram : « Les équipes derrière ce projet ont réalisé beaucoup de changements qui nous donnent aujourd’hui ce parcours ».

Le Blog Endurance Shop : Et Eliud Kipchoge va donc passer sous les deux heures…ou pas ?
Roger Kram : « Oui, nous pensons qu’il va le faire ».

Le Blog Endurance Shop : Voilà, super, au moins c’est clair !

1h59' sur marathon : est-ce vraiment possible ?
1h59' sur marathon : est-ce vraiment possible ?

Ce parcours viennois démarre avec une descente sur les premiers 800 mètres.

Ensuite, c’est quatre allers-retours dans le Prater, ce parc Viennois, avec rond point à chaque extrémité. Wouter Hoogkamer, le chercheur que nous avions interrogé sur la Nike Vaporfly et qui a depuis migré vers la University of Massachusetts nous a expliqué encore : « Le parcours est moins vallonné, tourne moins et aura sans aucun doute plus de spectateur pour l’encourager. Pour aider la team dans ses recherches sur cet événement rare, l’équipe américaine s’est également offert les services d’une triathlète et chercheur en physiologie de l’exercice à l’université de Vienne,  Christoph Triska, qui a utilisé son vélo pour réaliser des mesures précises sur le parcours de sa ville, notamment avec un altimètre barométrique pour être sûr de ne rien rater des variations du terrain et de l’altitude en gain et en perte. Pendant ce temps-là, d’autres ont tout simplement utilisé l’étonnant outil qu’est Google Earth afin d’être capables de calculer les courbes autour de chaque rond point. Et puis ils ont réalisé des calculs sensés leur indiquer à quel point chaque virage, chaque variation du terrain pourrait impacter la performance de Kipchoge. Un des chercheurs américains et co-auteure de cette recherche, Kristine Snyder, nous a également indiqué : « Moi j’adore les maths quand il y a un objectif et ce projet m’a permis d’appliquer mes qualités en mathématiques dans ce qui va sans doute être un des moments les plus forts que ce sport n’a jamais connu ».

« Nous avons utilisé des infos qui sont publiques afin de déterminer les variations du terrain, l’inclinaison de la route ainsi que les formes et les angles précis des virages du parcours » ont déclaré les scientifiques. Ils ont ajouté : « Grâce à des équations déjà disponibles concernant les effets associés de la vitesse, de la pente et des besoins en oxygène du coureur, nous avons réalisé des simulations pour quantifier combien le % de pente et comment la forme particulière des virages du parcours de Vienne pourraient influer sur la consommation d’oxygène de Kipchoge à vitesse constante, mais aussi influer sur sa vitesse à consommation d’oxygène égale sur tout le parcours ».

1h59' sur marathon : est-ce vraiment possible ?
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2%. C’est la variation prévue de la consommation d’oxygène d’Eliud Kipchoge

Ces scientifiques ont ajouté en choeur : « Nous estimons qu’en dehors d’une légère descente dans le premier km, la consommation d’oxygène d’Eliud ne changera pas de plus ou moins 2% entre le km 1 et le km 42. Par conséquent, sa consommation sur tout le parcours ne va croître que de 0.11%. De plus, à cause des différences de niveau du sol et des virages de ce parcours, Eliud ne devrait en théorie perdre que 5 secondes par rapport à un parcours idéal et totalement plat. Nous n’avons pas assez d’éléments pour tirer des conclusions quant à l’effet aérodynamique du drafting d’Eliud derrière ses lièvres mais le parcours a été visiblement suffisamment bien choisi pour minimiser les effets des différences de niveau du sol et des virages ». Wouter Hoogkamer nous a encore expliqué : « En fait, les virages et l’irrégularité de la route n’auront qu’un effet très léger et même beaucoup plus léger que ce que nous avions au départ imaginé ».

1h59' sur marathon : est-ce vraiment possible ?

Pour conclure sur cette tentative de record de ce matin

Il est important de noter que les auteurs n’ont cette fois pas porté leur regard sur la qualité des chaussures de course à pied qui vont être utilisées (une version améliorée de la Nike Vaporfly 4% que les recherches de l’université CU Boulder avaient justement mesurée comme étant capable de réduire le coût métabolique en course à pied de 4%). De plus, quoi qu’il arrive, le chrono de Kipchoge ne pourra pas compter comme chrono officiel de marathon. Son record du monde en 2h01’39 » de Berlin sera donc toujours valable. D’autant qu’en plus des nombreux lièvres, il y aura aussi une voiture pour ouvrir la route.

Il faut noter que Paolo Taboga, du Department of Kinesiology de la California State University et Christopher Arellano, de l’University de Houston ont également participé à cette étude.

1h59' sur marathon : est-ce vraiment possible ?
1h59' sur marathon : est-ce vraiment possible ?

Le papier entier de l’étude est ici (ATTENTION: droits réservés) :

https://osf.io/preprints/sportrxiv/xrjvb/

1h59' sur marathon : est-ce vraiment possible ?
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Introduction

The effects of course design (elevation undulations and curves) on marathon running performance: an a priori case study of the INEOS 1:59 Challenge in Vienna

Christoph Triska1,2, Wouter Hoogkamer3, Kristine L. Snyder4, Paolo Taboga5, Christopher J. Arellano6 and Rodger Kram7.

1. Centre for Sports Science and University Sports, University of Vienna, Austria 2. Austrian Institute of Sports Medicine, Vienna, Austria 3. Integrative Locomotion Lab, Department of Kinesiology, University of Massachusetts, Amherst, MA 01003-9258 USA 4. Stryd Inc., Boulder, Colorado, USA. 5. Department of Kinesiology, California State University Sacramento, USA 6. Department of Health and Human Performance, University of Houston, Houston TX, 77024-6015 USA 7. Locomotion Lab, Department of Integrative Physiology, University of Colorado, Boulder, CO 80309- 0354 USA

Corresponding author: Rodger Kram, rodger.kram@colorado.edu Twitter: CT – @christophtriska, WH – @woutersinas, PT – @PaoloTaboga_79, RK – @RodgerKram

Contributions: CT recorded the elevation change and GPS data, gathered information about the course, prepared Table 1 and Figure 1, wrote and edited sections of the manuscript.

WH verified and corrected errors in the elevation change and GPS data, helped to develop the overall strategy, prepared Table 1 and figures, wrote and edited sections of the manuscript.

KLS helped to develop the overall strategy, wrote and ran the simulation code, prepared figures, wrote and edited sections of the manuscript

PT measured the curve radii, prepared tables and figures, wrote and edited sections of the manuscript.

CJA helped to develop the overall strategy, prepared tables and figures, wrote and edited sections of the manuscript.

RK initiated the project, recruited the team, helped to develop the overall strategy, wrote the first draft of the manuscript and edited subsequent versions.

All authors consent to the sharing of this manuscript on SportRxiv. This is a preprint

Preprint DOI: https://doi.org/10.31236/osf.io/xrjvb

Conflicts of Interest:

KLS, WH and RK were paid for consulting service to the INEOS 1:59 Challenge. RK is a paid consultant to NIKE Inc.

Cite as: Triska, C., W. Hoogkamer, K. L. Snyder, P. Taboga, C. J. Arellano and R. Kram (2019). The effects of course design (elevation undulations and curves) on marathon running performance: an a priori case study of the INEOS 1:59 Challenge in Vienna. https://doi.org/10.31236/osf.io/xrjvb

Références Scientifiques

Abbott, B.C., B. Bigland and J.M. Ritchie. The physiological cost of negative work. Journal of Physiology (London) 117:380–390, 1952. https://doi.org/10.1113/jphysiol.1952.sp004755

Gottschall, J.S. and R. Kram. Ground reaction forces during downhill and uphill running. Journal of Biomechanics 38:445–452, 2005. https://doi.org/10.1016/j.jbiomech.2004.04.023

Hoogkamer, W., P. Taboga and R. Kram. Applying the cost of generating force hypothesis to uphill running. PeerJ 2:e482, 2014. https://doi.org/10.7717/peerj.482

Hoogkamer, W., R. Kram and C.J. Arellano. How biomechanical improvements in running economy can break the 2-hour marathon barrier. Sports Medicine 47:1739– 1750, 2017. https://doi.org/10.1007/s40279-017-0708-0

Hoogkamer, W., S. Kipp, J.H. Frank, E.M. Farina, G. Luo and R. Kram. A comparison of the energetic cost of running in marathon racing shoes. Sports Medicine 48:1009–1019, 2018A. https://doi.org/10.1007/s40279-017-0811-2

Hoogkamer, W., K.L. Snyder, C. Arellano C. Modeling the benefits of cooperative drafting: Is there an optimal strategy to facilitate a sub-2-hour marathon performance? Sports Medicine 48:2859–2867, 2018B. https://doi.org/10.1007/s40279-018-0991-4

Hoogkamer, W., C. Carmack, E.S. da Silva and S. Kipp. An integrative approach to the aerodynamics of elite marathon running performance. International & American Society of Biomechanics, 2019, Calgary, AB, Canada.

Kipp S., R. Kram and W. Hoogkamer. Extrapolating metabolic savings in running: implications for performance predictions. Frontiers in Physiology 10:79, 2019.

https://www.frontiersin.org/articles/10.3389/fphys.2019.00079/full

Margaria R., P. Ceretelli, P. Aghemo P and G. Sassi. Energy cost of running. Journal of

Applied Physiology 18:367–370, 1963. https://doi.org/10.1152/jappl.1963.18.2.367

Pugh L.G. The influence of wind resistance in running and walking and the mechanical efficiency of work against horizontal or vertical forces. Journal of Physiology 213:255– 276, 1971. https://doi.org/10.1113/jphysiol.1971.sp009381

Snyder, K. L. and C.T. Farley. Energetically optimal stride frequency in running: the effects of incline and decline. Journal of Experimental Biology 214:2089–2095, 2011. https://doi.org/10.1242/jeb.053157

Taboga, P. and R. Kram. Modelling the effect of curves on distance running performance. PeerJ Preprints 7:e27884v1, 2019

https://doi.org/10/7287/peerj.preprints.27884v1

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