
Deuxième et dernière partie de notre enquête exclusive.
Par la rédaction, avec notre envoyé spécial Gaël Couturier et le local de l’étape, Abhishek Grover. Photos © Standard Chartered Singapore Marathon, Ironman Asia.
On en avait parlé il y a une quinzaine de jours en essayant de ne pas vendre la mèche : https://leblog.enduranceshop.com/et-si-le-scsm-devenait-le-7eme-abbott-world-marathon-majors-part-i/. Mais ce n’est pas simple quand on a les infos exceptionnelles et exclusives directement des organisateurs du marathon qui, évidemment, poussent fort pour obtenir ce label, au point, peut-être de se montrer très optimistes auprès des journalistes que nous sommes. L’historique de « comment on en est arrivé là » a été expliqué sur le papier précédent. On ne va donc pas se répéter mais essayer plutôt aujourd’hui d’analyser, grâce à nos interviews des deux parties, les chances réelles qu’a ce Standard Chartered Singapore Marathon de devenir le 7ème Abbott World Marathon Majors, après Tokyo, Boston, London Berlin, Chicago et New York City Marathon.
Vous allez l’entendre dans les interviews suivantes du patron du marathon de Singapour, Geoff Meyer, Managing Director Ironman pour l’Asie, un quadra expatrié à Singapour pour gérer la marque Ironman et tous ses événements, l’affaire n’est pas encore dans le sac, même si son flegme naturel australien dissimule mal un bel optimiste. Les organisateurs du marathon de Singapour, à travers lui et sous la bannière Ironman donc, doivent continuer à séduire à la fois les responsables administratifs et politiques locaux du bien fondé de leur événement, mais aussi convaincre encore et toujours les responsables d’Abbott WMM. Car de ce coté-là, visiblement, rien n’est gagné. Nous avons à ce titre interrogé Tim Hadzima, l’Executive Director d’Abbott World Marathon Majors. Voici l’interview.
Le blog Endurance Shop : Où en sont les discussions de votre côté avec les gens du marathon de Singapour pour que cette épreuve, déjà très belle, devienne dans les années à venir, le 7ème Abbott World Marathon Majors ?
Tim Hadzima : Écoutez, nous envoyons une équipe sur place à Singapour pour étudier leur dossier chaque année depuis trois ans et nous avons en effet vu de très grandes améliorations au fil des années. Mais c’est un processus assez long et nous avons une liste de critères très strictes qui doivent être remplis avant de pouvoir s’intéresser plus avant à notre prochain partenaire. On va continuer de travailler avec ces responsables du marathon de Singapour et les aider à faire monter leur événement en puissance, qu’il arrive au niveau des tout meilleurs du monde que nous avons déjà sous notre bannière et que vous connaissez.
Le blog Endurance Shop : Quels sont les points positifs de cet événement à Singapour tel qu’il est aujourd’hui et qui, pour le moment, retiennent déjà toute votre attention ?
Tim Hadzima : La ville de Singapour en elle-même est une destination internationale extraordinaire au sein de laquelle se développe une forte passion pour les sports d’endurance. Ce sont deux premiers points importants, d’autant que la popularité du running n’a de cesse de progresser à Singapour depuis quelques récentes années. C’est d’ailleurs à l’image de la poussée de ces sports d’endurance dans l’ensemble de l’Asie du Sud-Est en général, et de la Chine en particulier, un endroit du monde où nous souhaitons bien entendu nous développer. Mais il reste des choses à améliorer du côté des organisateurs de Singapour afin d’atteindre ces objectifs. Je ne doute toutefois pas qu’avec le soutien complet du gouvernement local, et l’approbation des habitants de la ville, cette destination a tout le potentiel pour attirer les coureurs du monde entier.
Le blog Endurance Shop : D’accord mais pour résumer : c’est bon signe, il y a un bel espoir mais, à ce jour, rien n’est sûr. C’est ça ?
Tim Hadzima : C’est tout à fait ça. Rien n’est confirmé de notre côté quand à la possibilité d’avoir Singapour comme la 7ème de nos courses. Mais nous étudions le dossier avec attention.
On le voit, ce responsable d’Abbott ne se mouille pas vraiment, même s’il fait preuve de confiance et se montre encourageant. Il joue son rôle et ne veut rien annoncer trop tôt. Normal. On aurait aimé qu’il nous fasse une confidence, nous donne une « exclu », mais ça n’a pas été le cas. Les pièces ont bel et bien été avancées sur l’échiquier, mais la partie n’est pas finie. Comme vous allez pouvoir le découvrir dans la vidéo suivante, le marché asiatique du running en particulier et de l’endurance en général, est pourtant en pleine explosion.
Ce marché du Sud-Est asiatique est explosif, dans le bon sens du terme. Mais il est logique qu’après des épreuves américaines et européennes qui font le plein et pour lesquelles il est de plus en plus difficile de s’inscrire, les responsables des Abbott WMM s’intéressent à d’autres continents pour poursuivre leur expansion des marathons les plus prestigieux du monde. De quoi parle-t-on ? De l’Amérique du Sud (pas d’info à ce jour sur le pays), l’Afrique (forcément ça sera l’Afrique du Sud), et l’Asie. En Asie, alors, étant donné que Tokyo, au Nord, fonctionne déjà très bien, et que la Chine poursuit sa progression de son côté sans que les infos ne filtrent, mais avec là aussi sans doute un à AbbottWMM à venir très progressivement, il ne reste plus tellement de choix pour les villes partenaires. Bangkok en Thaïlande, Jakarta en Indonésie, Manille aux Philippines ? Ces villes, aussi séduisantes soient-elles ne ressemblent en rien à Singapour : elles sont plutôt désorganisées et ne permettent pas sereinement d’envisager d’organiser une course de ce niveau mondial. Alors qu’est-ce qui pourrait éventuellement bloquer ?
Nous avons également interrogé Thibault Vellard, le Regional Director pour l’Asie chez Ironman, un français, ancien d’Amaury Sport Organisation et du marathon de Paris expatrié à Singapour. Interview réalisée le 14 décembre.
Le blog Endurance Shop : Quel est le prix de l’organisation du marathon de Singapour par rapport à notre benchmark français, celui de Paris ?
Thibault Vellard : L’organisation du marathon de Singapour coûte entre 10 et 12 millions de $ singapouriens (entre 6 et 9 millions d’€, ndlr). Je pense que les chiffres d’organisation du marathon de Paris ont changé récemment, avec les importantes mesures pour la sécurité, mais il y a quelques années, on était plus de l’ordre de 2-3 millions d’€.
Le blog Endurance Shop : Quels sont les principaux changements de parcours que vous avez effectués cette année par rapport à l’an passé (que nous avions analysé en long, en large, et en travers ici :https://leblog.enduranceshop.com/et-si-le-scsm-devenait-le-7eme-abbott-world-marathon-majors-part-i/.)
Thibault Vellard : On n’est quasiment que sur la route, plus de « pedestrian path », de sentier ou passage pour piétons comme on le faisait avant. C’est quasi 100% de routes fermées à la circulation. On prend même un passage d’autoroute en hauteur, c’est super sympa.
Le blog Endurance Shop : L’an passé la médaille n’était pas top. Je l’avais trouvée très petite et cela m’avait étonné car vous êtes Ironman et ces triathlons sont réputés pour offrir des médailles particulièrement imposantes.
Thibault Vellard : Elle a changé cette année. On est revenu sur un modèle Ironman. Elle fait quasiment la taille de la médaille de l’Ironman de Lankawi, en Malaisie par exemple (elle était énorme ! Ndlr).
Le blog Endurance Shop : Je n’avais pas trouvé que les bénévoles sur le parcours mettaient beaucoup d’ambiance en 2017. Les ravitaillements étaient au poil, vraiment parfaits, mais sur la route, il n’y avait pas beaucoup d’ambiance….
Thibault Vellard : On a vraiment eu beaucoup de bons échos sur nos bénévoles cette année, l’épreuve 2018 donc. Il faut dire qu’on a aussi moins eu de mal à les recruter. On a visé plus de clubs de sport, des clubs dans les écoles, etc…et ça a mieux marché. Mais à leur décharge, ce n’est pas un rôle facile pour eux parce que c’est à 4-5h du matin !
Le blog Endurance Shop : Et globalement, pour la course de décembre dernier, quels ont été les retours ?
Thibault Vellard : Globalement, c’est un super succès. On le mesure entre autre sur les réseaux sociaux où les commentaires sont très positifs.
À propos du parcours et de la course qui se déroule tôt le matin, et dont l’horaire changerait si la course devenait un WMM, regardez les deux vidéos suivantes :
Du coup, forcément, on peut se demander si, dans la fournaise de Singapour, même avec des températures plus basses le soir que le matin, moins d’humidité le soir que le matin, les meilleurs marathoniens du monde vont venir courir à Singapour, que la course obtienne le label Abbott WMM ou non.
Quoi qu’il en soit, et pour vous résumer l’affaire, le principal obstacle reste visiblement celui du gouvernement de Singapour qui, même s’il reconnaît en bonne intelligence l’intérêt économique et de prestige pour la ville, reste extrêmement prudent à ne pas perturber son rythme et son équilibre. Cette complexité, cette mentalité purement singapourienne, est parfaitement bien exprimée dans l’interview suivante.
Pour conclure, afin d’illustrer la bonne santé de l’investiture de Wanda dans les sports d’endurance – rappelons que Wanda c’est Ironman et que les Abbott WMM ont signé un contrat de partenariat avec Ironman – mais aussi pour ceux qui s’intéressent de près aux Ironman, voici la réponse à une des rumeurs les plus entendues dans les parcs à vélo en 2018 : Wanda va-t-il vendre Ironman ?
Voilà, vous en savez désormais autant que nous. En attendant d’autres développements et l’annonce officielle par Ironman et Abbott WMM, le site de la course donne un aperçu de ce à quoi on peut s’attendre : www.SingaporeMarathon.com.
Dans la même rubrique