
Langkawi, île de rêve et de dangers
Par la rédaction, avec Gaël Couturier, 4 fois finisher. Photos © Lacerations®, Ironman Langkawi.
En 2010 et après 10 années d’existence, la course avait alors lieu en janvier ou février, mais faute d’avoir su trouver son public, faute aussi à quelques malversations financières et à des crises politiques locales à répétition, le triathlon Ironman de Malaisie disparaissait. Tristes tropiques. Le 27 septembre 2014, l’épreuve renaissait joyeusement de ses cendres pour notre plus grand plaisir et grâce à une nouvelle équipe locale déterminée et une supervision de type main de fer du bureau Ironman asiatique. Langkawi, une île de rêve méconnue, peuplée de charmantes créatures, au marathon réputé plus difficile que celui d’Hawaii nous fait donc toujours autant rêver. C’est notre coup de cœur absolu. Voici pourquoi.
« Que suis-je venu faire dans cette galère ? À peine engagé sur le marathon que je suis déjà un triathlète au bord de la crise de foie. Je vis un enfer. Les 20 minutes à la transition vélo / course à pied passées allongées sur le sol comme un gros légume, les jambes relevées pour faire circuler le sang, ne présageaient rien de bon. Je ne digère plus tous ces mélanges accumulés : eau, coca et surtout l’Aqua 100, une boisson isotonique Malaisienne légèrement pétillante. Il faut dire que les ravitaillements en vélo sont ici en tous points exceptionnels et donc irrésistibles avec des températures au-delà des 35°C : boissons gardées fraîches à grand renfort d’énormes sacs de glace ou tranches de pastèque sur lit de glaçons…pour vous servir ! Le tout est offert avec une joie non dissimulée et franchement beaucoup d’encouragements de la part des bénévoles qui sont tous plus excités les uns que les autres. Malgré une stratégie de course consistant à boire une grosse gorgée toutes les 10 minutes sur mes 6h de vélo, après mes 1h15 de natation non-stop, j’étais en train de rendre l’âme ». Langkawi est une course difficile, oui, le récit de notre journaliste est pour le moins explicite. Mais c’est aussi un rêve, et une expérience qu’on n’oublie pas, un rite qui vous rendra plus fort. Âmes sensibles s’abstenir.
À Langkawi la plage est blanche, chaude, impeccable.
Des tas de petits crabes translucides courent sur le sable à toute vitesse pour se planquer. L’eau est à 30°C et l’horizon est couvert d’autres îlots de rêve. Sur le parking de l’hôtel, sous les palmiers et au milieu de noix de coco tombées au sol, il se peut que vous fassiez nez à nez avec un petit serpent, ou un gros, c’est selon. La course est belle mais c’est clairement une autre planète. Attendez-vous à un dépaysement en XXL. La natation est sans mauvaises surprises. Tout le monde ne nage pas comme Laure Manaudou ou Michael Phelps mais qu’est-ce qu’on s’amuse. Si vous nagez lentement, vous aurez même la joie de vous faire doubler par les pros qui sont pourtant partis quelques minutes avant vous. Mais comme il y a deux tours, vous n’avez pas encore fini votre premier tour qu’ils en terminent du second et vous passent comme des requins blancs affâmés à la poursuite d’un gros phoque bien ventru bien velu. Le phoque, c’est vous.
Natation : les vrais plus. Non, pas de moins.
– Eau délicieusement chaude (30°C le matin de la course).
– Nage totalement safe : pas de courant, pas de crocodiles, pas de requins, ce qui est à priori étonnant dans ces eaux tropicales si poissonneuses. Ou alors on ne les voit pas. Et ils sont bien nourris.
– Paysages enchanteurs lorsque vous levez la tête de l’eau (faites l’effort !) : de jolis voiliers par dizaine, de petites îles de partout et des collines couvertes d’une végétation luxuriante. Pas de doute, vous êtes au bout du monde. Si ça c’est pas le paradis franchement ça y ressemble drôlement !
– Départ par vague : vous choisissez votre temps final (4 sas différents : moins d’1h15, 1h15-1h30, 1h30-1h45, 1h45-2h) et partez les uns après les autres à 4-5 nageurs en ligne toutes les 10 sec. Le résultat est hyper efficace : absolument aucune gêne comme lors des départs groupés souvent redoutés à raison tant il est aisé de prendre un mauvais coup ou de se sentir oppressé.
Pour le vélo, c’est moins drôle. Nid de poule, macaques à longue queue et gros lézards.
Le vélo est une formalité pour un athlète qui s’est correctement entraîné. C’est vrai. Sauf qu’il fait chaud, très chaud. Et humide, très humide. Vous prenez donc des coups mais c’est sans vous en apercevoir. C’est pas grave, vous le paierez sur le marathon… Attention, ce parcours vélo est toutefois loin être plat – il n’a quand même rien à voir avec Nice et encore moins Embrun bien sûr. La clé réside dans la gestion de son alimentation et de son hydratation. Il faut accepter la sensation de soif et ne pas chercher absolument à la supprimer. Trop boire à vélo c’est vous condamner à un calvaire sur le marathon. En somme : il faut accepter de souffrir. Les paysages merveilleux défilent devant vous, des enfants charmants vous tendent leurs petites mains, les ravitaillements sont fournis, fiables.
Mais attention, car plus d’un triathlète s’est envolé sur un ou deux nids de poule bien placés ; et on ne parle pas des singes un brin vandales vautrés au milieu de la chaussée sur une partie précise du parcours heureusement signalée. Ces brigands sont réellement sans scrupules. Ils n’ont de plus certainement pas froid aux yeux et se jetteraient sur vous si vous faites un faux pas. Ne riez pas, c’est déjà arrivé. Ils vous fileraient une gifle, ou, pire, un bon coup de canine. Croyez-nous, dérober les barres énergétiques et les bananes des concurrents a plus d’une fois traversé leurs petits cerveaux. Quant aux gros lézards tout verts d’un bon mètre cinquante qui traversent régulièrement sous vos roues sans crier gare ni sourciller, c’est un des autres pièges de cette île merveilleuse. Prudence donc…
Parcours vélo : les deux « plus » d’abord, le « moins » ensuite.
– Les locaux et tous ces enfants croisés sur le parcours ont l’air heureux de vous voir passer et vous encouragent. Ça fait vraiment plaisir.
– Là encore les paysages sont exceptionnels. C’est vert, très vert, un vert que vous ne voyez que sous les tropiques. Certains passages laissent aussi entrevoir le bleu de la mer, renforçant cette idée fabuleuse que vous êtes non seulement au bout du monde, mais sur une île. Un poème ce parcours vélo, vraiment.
– Le revêtement de la route devrait être sérieusement amélioré. Même si tout cela reste correct, c’est quand même de pire en pire chaque année. Il y a 2-3 passages vraiment dangereux. Pour des dossards à 500$ et le label de référence mondial, c’est…inacceptable.
Bon, alors, ce marathon….
Il est dur, très, très dur. Pas de panique. Voici les « plus » :
– Ambiance très agréable sans l’hystérie de certaines courses en occident, on pense à l’Allemagne notamment. Vous avancez dans un environnement hyper friendly où tout le monde vous veut du bien…quand il y a du monde. Parce que ce marathon vous fait aussi passer de sacrés moments loin de la foule. La route de l’aéroport est un calvaire. On l’explique bien dans la vidéo.
– Ravitaillement bien garnis et surtout très bien organisés. Ils sont longs, variés et les boissons ou les éponges, grâce à un renfort surréaliste de glaçons, sont toujours fraiches. Bref, pour prendre un gros coup de chaleur, il faut vraiment le faire exprès.
– L’aire de transition climatisée est un régal (mais c’est aussi à double tranchant….là encore écoutez bien la vidéo)
Ah. Voici les « moins » maintenant :
– Vous allez souffrir (Ça tombe bien vous aimez ça).
– Il n’y aura pas beaucoup de spectateurs (le plus gros du parcours à pied est assez difficile d’accès – pas impossible, mais difficile).
– L’aire de transition peut vous piéger car si vous êtes fatigué ou un peu mal, elle vous donnera l’impression d’entrer dans un frigo. Pas drôle (c’est à double tranchant on vous dit….)
Conclusion
C’est toutefois l’une des plus belles épreuves du calendrier Ironman dont les épreuves se courent à travers toute la planète. C’est en effet d’abord l’une des rares à se passer sur une île, qui plus est une île exotique du bout du monde qui reste encore très préservée. Mais Langkawi est aussi une course difficile, une épreuve exigeante qui peut, en cas de faux pas, s’avérer dantesque. La chaleur, l’humidité, les pièges sur la route font de cette course Ironman un monde à part. Mais comme pour tous les voyages un tant soit peu lointains : qu’il est bon de prendre ces risques et de vibrer comme jamais. Langkawi se mérite. C’est une course qui vous change un homme, ou une femme.
Dans la même rubrique