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L’étape marathon est le plus souvent une fine partie de rigolade. Ou presque.

Marathon Des Sables. 5ème étape. Et point final.

14 avril 2019 | Évènements

Par la rédaction, avec Gaël Couturier, aujourd’hui 7 fois finisher.
Photos © Marathon des Sables / Cimbaly.

Marathon Des Sables. 5ème étape
Marathon Des Sables. 5ème étape

Une fois la grande étape passée, les esprits se détendent, la pression redescend d’un cran, tout le monde se calme et tout le monde termine le Marathon Des Sables. Ou presque. Il ne reste en effet qu’un marathon à faire, un vrai. C’est beaucoup, c’est autant que celui de Paris, le chaud et le sable en plus. Le chien Cactus est aussi en plus bien sûr. Mais par rapport à ce qu’on vient de faire, ce n’est vraiment pas si terrible. C’est même très beau. Et symbolique.

Vous le savez, vous l’avez compris, le Marathon Des Sables est une course difficile, encore plus difficile les années de très grosse chaleur, mais pas insurmontable.

Loin de là. Bien sûr il faut se priver de beaucoup de choses, supporter de dormir par terre au milieu des cailloux et du sable qui rentre partout (dans son duvet, dans ses oreilles, dans sa bouche), supporter de ne pas se laver, de manger autre chose que les bons petits plats de sa maman (du lyophilisé pour la plupart d’entre nous, de la nourriture liquide aussi parfois pour les plus extrêmes d’entre nous), de partager sa tente avec 6 ou 7 autres compagnons d’infortune, que vous ne connaissiez pas forcément avant, de ne boire que de l’eau tiède pendant 6-7 jours (pas de bulles, pas de soda, pas de champagne), voir l’état de ses pieds se détériorer de jour en jour quoi que vous fassiez ou ayez fait avant (tannage, pas tannage, peu importe : ça va saigner ! Se soigner seul ses ampoules et éviter l’infection, partager son chemin avec de beaux (mais dangereux) serpents (si si ça arrive, un ami journaliste a bien marché sur une vipère des sables durant la grande étape de nuit – « cerastes cerastes (Linnaeus, 1758 de son nom scientifique. Dangereuse ? Un peu. Beaucoup. Passionnément), dormir au milieu des nids de scorpions jaunes légèrement translucides (bof, non pas dangereux, enfin pas vraiment. Et puis très jolis !), ne pas voir d’oasis (ça n’existe quasiment pas sauf dans Tintin et le Petit Prince), souffrir éventuellement de déshydratation, se faire des copains copines d’un autre monde (Pakistanais, Indien, Néo-Zélandais et bien d’autres parmi les 51 nations représentées cette année), souffrir de la chaleur la journée et du froid la nuit (5 degrés la première nuit !) et se réveiller tous les jours au lever du soleil avec l’angoisse que les gentils employés marocains du bivouac vous arrachent le toit de votre tente avant que nous n’ayez encore eu le temps de sortir de votre duvet bien douillet (on l’a tous vu de nos yeux vu !)

Ah, j’oublias : il faut aussi – bien sûr – courir l’équivalent d’un marathon par jour, en moyenne, sur 5 jours.

Marathon Des Sables. 5ème étape
Marathon Des Sables. 5ème étape
Marathon Des Sables. 5ème étape

Mais bon, allons, vraiment, cette étape marathon n’est qu’une formalité.

D’abord, et je l’ai déjà dit dans mon interview vidéo sur Facebook, celle-ci vient après la grande étape. Elle est donc beaucoup plus simple à faire passer, mentalement parlant (ce qui a un impact fort sur le physique bien sûr). Ensuite, les paysages que nous ont offerts Patrick Bauer et ses amis pisteurs ont été bien au-delà de nos espérances.

Certes, ce parcours du 42 km avait des points communs avec certaines étapes des éditions précédentes, celle de l’an passé notamment, et ce fameux Djebel El Otfal dont personne ne se lasse jamais (pente à 25% de moyenne, main courante, vertige assuré). Car prendre de la hauteur ne fait jamais de mal ici, bien au contraire : les montées ensablées sont dures mais les vistas sont sans égal et à 360 degrés. Ce qui est difficile ici voyez-vous (j’écris ce texte au bord de la piscine sous 30 degrés et les doigts de pied en éventail) ce sont les longues lignes droites infinies, poussiéreuses, rocailleuses, brûlantes. Elles n’en finissent pas. Elles peuvent rendre fou. Alors dès qu’il faut affronter un peu de relief, tout le monde est soulagé. C’est un fait.

Marathon Des Sables. 5ème étape

J’avoue : le MDS c’est bien plus que de la souffrance. C’est surtout du plaisir. Beaucoup de plaisir. Et du développement personnel.

Pour paraphraser le psychiatre et psychanalyste suisse Carl Jung, je dirais moi du Marathon Des Sables qu’il n’y a pas de prise de conscience de la beauté immense de cette course sans souffrance.

Par conséquent, tout ce que j’ai pu décrire avant (les serpents, les scorpions, le vent, le sable et toutes ces horreurs-là) sont en réalité une déclaration d’amour « jungienne » à cette épreuve et à son créateur (parfois incompris, parfois sous-estimé), le doux Patrick Bauer.

Marathon Des Sables. 5ème étape
Marathon Des Sables. 5ème étape
Marathon Des Sables. 5ème étape
Marathon Des Sables. 5ème étape

Finir le Marathon Des Sables c’est avancer dans la vie, faire d’énormes sacrifices et progrès en tant que coureur à pied et en tant qu’homme, ou femme. C’est repousser ses limites pour se re-découvrir, se re-definir, apprendre sur soi-même, sur ses congénères, ses semblables, sur la nature, la faune et ce monde sauvage qui nous entoure mais qu’on ne connaît pas, ou si peu, si mal.

Faire et bien sûr finir le Marathon Des Sables c’est aussi tout simplement se rappeler qu’on est vivant, qu’on est en bonne santé, qu’on est riche de mille choses, qu’on a de la chance, qu’on aurait (moralement) tort de se plaindre, que nos petites souffrances ne sont rien, que notre destin est nul par ailleurs qu’entre nos mains, nos pieds aussi, et qu’avec du courage, de la ténacité, de l’entraînement, parfois un peu d’acharnement et un peu de chance sans doute, oui, rien ni personne ne peut nous résister. Le Marathon Des Sables n’est pas à prendre à la légère, ni à sous-estimer. Parce que c’est une course à étapes, longue, dure, elle inculque la patience et développe la foi. C’est, en somme, une école de la vie, du progrès, de l’humilité et de la persistance. Pas étonnant que certaines unités militaires étrangères la mette au programme de leur entraînement, de leurs secrètes sélections. Vous ne le prouverez jamais. Pourtant c’est vrai. Il faut du caractère pour aller au bout d’une telle épreuve, comme il en faut pour finir son premier marathon, son premier semi-marathon, son premier ultra, son premier triathlon.

Marathon Des Sables. 5ème étape
Marathon Des Sables. 5ème étape

Sommes-nous tous des conquérants de l’inutile, comme nous appellent parfois les sociologues du sport ? Pas sûr. Pas sûr du tout même. Tout cela me semble en effet très utile au bon développement personnel au contraire. Alors longue vie au MDS. Vivement l’année prochaine. Merci Patrick Bauer.

Marathon Des Sables. 5ème étape
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