Et pourquoi les mangeurs de Corn-Flakes auraient dû tous rester à la maison, 2ème partie.
Par François-Xavier Gaudas & Gaël Couturier. Photos © UTMB®
Parmi tous les favoris, trois nations se dégagent très nettement : la France (normal on est chez nous !), les Espagnols (Kilian fait des émules, on ne s’émeut pas) et…et…ces foutus ricains qu’on adore : ils sont plus de deux cents coureurs made in USA au départ des différentes courses de l’UTMB cette semaine ! Cela place tout simplement le pays de l’Oncle Trump dans le top 10 des nations les plus représentées – 37 coureurs élites, juste derrière les 44 espagnols et les 52 français. Seulement voilà, le gros problème de ces mangeurs de Corn-Flakes qu’on adore, du moins chez les hommes, c’est qu’ils ne gagnent pas ici à Chamonix – jamais !
Petit rappel pour le live : http://dai.ly/x249y16
Chez les femmes, on le sait, il y a déjà eu trois vainqueurs Américaines différentes
Nikki Kimball (2007), Krissy Moehl (2003 et 2009) et Rory Bosio (2013 et 2014). Alors, certes, oui, Tim Tollefson est bien arrivé 3ème l’année passée sur l’UTMB mais c’était à peu de choses près son premier 100 miles. Chance du débutant ou star en devenir ? Allez savoir. Nous l’avons interrogé. Mais les autres ? Ont-ils demandé conseils à ceux qui se sont ramassés : Scott Jurek, Anton Krupicka, Karl Meltzer, Geoff Roes, Rickey Gates, Mike Wolfe, Scott Mason, Cory Johnson, Hal Koerner, Nick Clark, Mike Wolfe, Rob Krar, Timothy Olsen ou Dakota Jones ? Tous ceux-là ont échoué, parfois lamentablement (Scott Jurek qui fait une sieste de 3h30 en 2011 parce qu’il a mal au ventre est un exemple). Nos Français sont eux capables de gagner des courses aux USA (Julien Chorier et Sébastien Chaigneau sur la Hardrock 100, respectivement en 2011 et 2013) alors pourquoi les Américains ne gagnent pas ici ? En bons petits provocateurs que nous sommes (rien de tel que de l’anti-politiquement correct primaire), nous leur avons demandé quel était le problème.
Depuis que Kilian a déserté l’UTMB, la course est la chasse gardée des français
Deux victoires de François d’Haène, deux victoires de Xavier Thévenard et une victoire de Ludovic Pommeret, l’année dernière. A l’inverse, les meilleurs classements américains restent la deuxième place de Mike Wolfe en 2010 sur un parcours coupé en deux à cause des conditions météo, et l’exceptionnelle deuxième place de Topher Gaylord en 2003 ex-aequo avec le coureur Montrail Brandon Sybrowsky (à l’époque mari de Krissy Moehl), derrière la toute première légende vivante de la course : Dachhiri-Dawa Sherpa.
– Jim Walmsley : « Je pense que cette année il y a comme un mini-championnat des Etats-Unis au sein même de la course, c’est super excitant ! Ce qu’il nous a manqué les années précédentes ? Je dirais une meilleure tactique, une préparation plus adaptée à celle que font les coureurs européens qui performent partout. Le gros stéréotype du coureur américain c’est ‘’très fort en montée mais qui se fait défoncer en descente’’ et il y a du vrai la-dedans ! Peut-être que si on y va moins fort en montée pour garder des forces sur le dénivelé négatif, ça peut passer. François (d’Haène), Kilian ou encore Xavier font ça très très bien et de manière constante, sans craquer. C’est là qu’il faut qu’on aille les chercher pour avoir une chance. Je pense avoir l’avantage sur Kilian en descente, et pourtant il est fort, et c’est vrai aussi qu’il a une grosse pancarte dans le dos… en espérant qu’on la voit le moins possible pendant la course (rires) »
– Tim Tollefson : « C’est ma troisième année ici, après ma deuxième place sur la CCC il y a deux ans et ma troisième sur l’UTMB l’année dernière. Mon chrono était déjà super satisfaisant (22h30) et je pense vraiment pouvoir l’améliorer encore cette année et me rapprocher de la victoire, j’y crois vraiment. J’ai plus d’expérience et j’aurai moins le frein à main cette fois-ci. Ma tactique va également évoluer et je sais que mon entraînement a été bien meilleur qu’en 2016. J’ai fait plus de dénivelé et je me sens plus fort. Pour ce qui est du blocage des américains ici, je pense qu’il est beaucoup lié à l’adaptation à plein de paramètres. Ici, il y a 10 fois plus de coureurs que chez nous, on part le soir alors qu’en général aux USA on part le matin, la météo change beaucoup plus, l’altitude n’est pas la même et le terrain n’a rien à voir avec que l’on peut affronter sur une Hardock ou une Western States. Bon je dis ça, mais en fait ça prouve surtout que les coureuses américaines sont plus fortes que les mecs (rires) ! J’ai parlé à Tim Olson et Mike Foote et aussi Zach Miller et j’ai appris pas mal de trucs de leur part pour mettre toutes les chances de mon côté. »
Sage Canaday : « Je suis venu ici pour me prouver que je peux courir un ultra de cette difficulté, je ne pense pas pouvoir me mêler à la bagarre avec les autres devant. C’est la course ultime, la plus compétitive et avec le plus bel environnement que je connaisse dans le monde. Chamonix est un mythe pour l’outdoor et les sports de montagne. C’est vraiment cool d’être là ! Les français et les autres européens sont tous très forts et connaissent le parcours sur le bout des doigts. Julien Chorier a pu gagner la Hardrock aussi, ça montre à quel point vous pouvez être forts vous les français. J’estime vraiment que nous avons les meilleures chances cette année parmi tous les coureurs pour enfin l’ajouter au palmarès américain. Cela va être très difficile bien sûr mais que ce soit Hayden Hawks, Tim Tollefson ou Jim Walmsley bien sûr, ils seront dans le coup. Ils doivent être patients et intelligents tactiquement, ne pas partir trop tôt ou réagir trop tôt à une attaque en tête de course pour ne pas craquer bêtement sur la fin. »
A les entendre ces trois-là, les américains ont une énorme chance de l’emporter cette année malgré la concurrence féroce de nos Français et Espagnols.
Sébastien Chaigneau, athlète The North Face 3ème en 2011 et 2ème en 2009, pense quant à lui que : « Kilian va encore écraser la concurrence et probablement passer sous les 19h30 grâce aux américains qui vont lui servir de rampe de lancement. Les coureurs US ne sont pas adaptés à une course comme l’UTMB et devraient faire comme Kyle Skaggs, qui était allé s’installer 6 mois à Silverstone, à 3000 m d’altitude près du départ de la course, pour s’entraîner dans l’environnement de la Hardrock. Il l’a gagné en 2008 en battant le record de la course de l’époque en 23h23 ! Cela dit, ils ont largement les moyens de gagner et vont en être de plus en proches dans les années à venir si ça ne se fait pas ce week-end ».
François d’Haène, vainqueur en 2012 et 2014, botte quant à lui un peu en touche : « Rien ne les empêche d’aller au bout mais il faut savoir être patient, humble face aux objectifs et arriver ici en se disant qu’il faut d’abord le finir, puis penser au temps et enfin à la place. Les années précédentes, certains sont peut-être arrivés ici trop focalisés sur le chrono qu’ils voulaient faire et en ont oublié la tactique. Sur un ultra ce n’est pas la meilleure solution et je n’ai pas peur de dire, malgré mon doublé ici, que je vais y aller simplement pour faire du mieux que je peux et avec les jambes que j’aurai ce jour-là ». Est-ce une petite pique déguisée pour Tim Walmsley qui arrive sur les starting-blocks avec les dents déjà bien aiguisées pour sa première participation ?
Notre ami Bryon Powell du site irunfar.com nous a fait par de ses prédictions en exclu.
Les voici :
UTMB
Femmes
- Caroline Chaverot
- Mimmi Kotka
- Andrea Huser
Hommes
- Kilian Jornet
- François D’haene
- Zach Miller
CCC
Femmes
- Nathalie Mauclair
- Clare Gallagher
- Anna Comet
Hommes
- Hayden Hawks
- Ryan Sandes
- Ludovic Pommeret
Conclusion
Rendez-vous donc ce samedi aux alentours de 13-14h pour le verdict de « la course du siècle » comme nous le clame haut et fort l’organisation depuis des mois et pour, peut-être, enfin, voir la bannière étoilée de notre Donald Trump chéri sur la plus haute marche du podium de l’ultra-trail le plus populaire du monde. On a hâte ! Si si.
Dans la même rubrique